Jérémy VERNIER, juriste, 30/04/2020.
Qu’est-ce que la rupture conventionnelle homologuée ?
La rupture conventionnelle instaurée depuis 2008, permet au salarié et à l’employeur de mettre fin de manière amiable au contrat de travail.
La rupture conventionnelle répond à une situation où de manière générale, le salarié ne correspond plus aux attentes de l’employeur sans que ce dernier n’ait quelconque motif valable de rompre le contrat ou bien que le salarié ne souhaite plus rester dans l’entreprise sans pour autant vouloir démissionner.
Est-ce que les salariés protégés peuvent être concernés par ce type de rupture ?
Oui, la rupture conventionnelle peut s’appliquer aux salariés protégés tels que les délégués syndicaux, membre élu du comité social et économique, conseiller du salarié, conseiller prud’homal etc… Mais il existe des règles spécifiques à respecter.
Quelles sont les conditions de validité de ce mode de rupture ?
Il ne peut y avoir de rupture conventionnelle valable sans les deux parties consentantes.
En effet, tout vice du consentement (l’erreur, le dol, la violence physique ou morale) est de nature à remettre en cause la validité de la rupture conventionnelle et de considérer une rupture dans un tel contexte comme étant un licenciement injustifié.
C’est ainsi que la jurisprudence a reconnu la nullité d’une rupture conventionnelle dans le contexte d’un harcèlement moral avec violences psychologiques (Cass. chambre sociale. 30 janvier 2013, n° 11-22332) mais il faut cependant la preuve d’un vice du consentement car en l’absence de vice du consentement, l’existence de faits de harcèlement moral n’affecte pas en elle-même la validité de la rupture conventionnelle (Cass, chambre sociale 23 janvier 2019 n°17-21550) ou encore la nullité d’une rupture conventionnelle du vice de consentement de l’erreur provoqué par des informations erronées données par l’employeur au salarié sur ses droits au chômage (Cour de cassation, chambre sociale, 5 novembre 2014, N° : 13-16372).
La rupture conventionnelle est-elle possible pendant un arrêt de travail pour maladie, accident du travail ou encore congé maternité ?
Oui, à partir du moment où il n’y a ni fraude à la loi, ni vice du consentement, une rupture conventionnelle peut survenir à l’occasion d’un arrêt de travail pour accident du travail, maladie professionnelle ou encore congé maternité.
En effet, la Cour de Cassation admis la possibilité de conclure une telle rupture pour un accident du travail (exemple : Cour de cassation, chambre sociale, 16 décembre 2015, n° 13–27212) ou congé maternité (exemple : Cour de cassation, chambre sociale, 25 mars 2015 N°14-10149).
Comment parvient-on à signer une rupture conventionnelle ?
La rupture conventionnelle doit être conclue au moins durant un entretien au cours duquel le salarié a la possibilité d’être assisté par un salarié de l’entreprise ou un conseiller du salarié (en l’absence d’instance représentative du personnel dans l’entreprise) de la même manière que l’employeur peut être, de son côté, assisté par quelqu’un appartenant à l’entreprise ou bien par un représentant syndical d’employeurs ou encore un employeur de la même branche.
Quel est le contenu de la convention signée par les parties ?
Les parties sont libres de définir les conditions de la rupture du contrat de travail mais sont notamment prévus la date de rupture du contrat de travail, fixée au plus tôt au lendemain du jour de l'homologation ou de l'autorisation de l'inspecteur du travail et le montant de l'indemnité spécifique de rupture conventionnelle.
Les parties signent la convention de rupture conventionnelle et le salarié se voit remettre un exemplaire sous peine d’annulation de la rupture conventionnelle (Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 6 février 2013, 11-27000)
Les parties peuvent-elles se rétracter ?
Oui, chaque partie dispose d'un droit de rétractation de 15 jours calendaires dont le départ du délai débute le lendemain de la date de signature de la convention mais lorsque le dernier jour du délai tombe un samedi, un dimanche ou un jour férié ou chômé, il est prolongé jusqu'au 1er jour ouvrable suivant.
Ce délai permet aux parties de revenir sur un engagement qui serait trop pris à la légère sans mesurer exactement les conséquences de la signature d’un tel acte.
A l’issue du délai de rétractation de 15 jours calendaires, quelle démarche doit être réalisée ?
À l’issue du délai de rétractation mentionné ci-dessus, la partie la plus diligente (le plus souvent l’employeur) adresse une demande d’homologation au moyen du formulaire réglementaire à la Direccte (inspection du travail) avec un exemplaire de la convention de rupture.
Le contrat de travail continue-t-il à s’exécuter durant la période de rétractation et d’instruction par la Direccte ?
Oui, sauf accord express des parties, le contrat de travail continue de s’exécuter normalement pendant tout le temps que dure la procédure d’élaboration et d’homologation de la convention, et ce, jusqu’à la date fixée pour sa rupture.
Que se passe-t-il après la transmission de la demande à la Direccte ?
La Direccte dispose d’un délai d’instruction de 15 jours ouvrables (sont exclus les dimanches et les jours fériés), à compter démarre du lendemain de la réception de la demande et si ce délai de 15 jours expire un samedi, un dimanche ou un jour férié ou chômé, il est prorogé jusqu’au premier jour ouvrable suivant.
Que fait la Direccte durant cette période ?
La Direccte s’assure du respect de la liberté de consentement des parties, des règles relatives à l’assistance des parties, au droit de rétractation, au montant minimal de l’indemnité spécifique de rupture conventionnelle etc…
Et si la Direccte ne répond pas ?
L’homologation sera donc réputée acquise de manière tacite.
Le salarié doit-il accomplir un préavis ?
Non, le contrat de travail est rompu sans exécution d’un quelconque préavis.
Et s’agissant des salariés protégés ?
La rupture conventionnelle est soumise à l’autorisation de l’inspecteur du travail et non à homologation.
La rupture du contrat de travail ne peut intervenir que le lendemain du jour de l’autorisation donnée par l’inspecteur du travail, lequel dispose pour instruire la demande du délai de droit commun de l’autorisation qui peut être prolongé jusqu’à deux mois.
Que doit percevoir le salarié dont le contrat est rompu par le biais de la rupture conventionnelle ?
Le salarié doit percevoir une indemnité spécifique de rupture dont le montant minimal est celui de l’indemnité légale conventionnelle de licenciement (selon l’indemnité la plus favorable pour le salarié).
Les parties peuvent prévoir une indemnité spécifique supérieure au montant légal ou conventionnel.
Que se passe-t-il à la fin du contrat ?
L'employeur doit remettre au salarié les documents de fin de contrat tels que le certificat de travail, l’attestation Pôle emploi et le solde de tout compte et éventuellement un état récapitulatif de l'ensemble des sommes et valeurs mobilières épargnées.
Le salarié perçoit l'indemnité de congés payés, s'il n'a pas pris tous les congés acquis à la date de rupture du contrat.
Le salarié a-t-il le droit aux allocations chômage ?
Oui, le salarié a le droit aux allocations chômage dans la mesure où il remplit les conditions lui permettant d'en bénéficier.
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